Thursday, May 10, 2007

Dans ce monde dominé par le faux-semblant, la stabilité repose sur un tissu de contradictions subtilement schizophrènes

Bertrand Le Gendre has an article on Nicolas Sarkozy, but the best article on the election related to recent French history is Marc Weitzmann's (almost as good as Thierry Wolton's).
Ce décrochage entre les milieux dits "culturels" ou progressistes (les partisans de "l'ordre juste") et le langage, voire la réflexion historique, mériterait à lui seul une analyse serrée.

Pour essayer de comprendre à la fois cette violence à gauche, et le sentiment de forte cohérence et de nouveauté à droite, peut-être faut-il garder en mémoire les illusions historiques sur lesquelles ont reposé ces termes, droite et gauche, au cours de l'époque qui précède, c'est-à-dire durant la guerre froide.

… La particularité de la France dans ce contexte est d'être la seule à doubler ce travail d'un mythe politique qui la range, malgré la défaite de 1940 et la collaboration, du côté des vainqueurs. Ce mythe est légitimé par les deux partis issus de la Résistance, qui sont aussi les deux principales forces politiques du pays et vont le rester peu ou prou jusqu'à la fin de la guerre froide : d'un côté les gaullistes, de l'autre le Parti communiste.

Deux mouvements révolutionnaires, deux mouvements nationaux reprenant à leurs compte le centralisme d'un Etat fort - deux mouvements antilibéraux, aussi, dont la puissance d'attraction va permettre d'entretenir, malgré la décolonisation, l'illusion de puissance.

A l'intérieur, une droite apaisée accepte grâce à de Gaulle l'idée de République, tandis qu'une gauche communisante sait limiter ses élans révolutionnaires à la fonction publique. … dans ce monde dominé par le faux-semblant, la stabilité repose sur un tissu de contradictions subtilement schizophrènes où se réécrit l'hostilité, sinon la haine traditionnelle du pays vis-à-vis du libéralisme économique.

… La nouveauté de Nicolas Sarkozy n'est-elle pas précisément là ? Le gaullisme a su ramener la droite dans la République, sans pour autant la convertir au libéralisme, alors que le PC maintenait la gauche dans une tradition antilibérale que même François Mitterrand n'est pas parvenu à vaincre. Les douze années que nous a infligées Jacques Chirac sont sans doute l'agonie de cette histoire à droite - agonie dont le point d'orgue aura été l'élection de 2002 - tandis que le PS se prépare à vivre la sienne.

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